Felix Billaud raconte…

Félix habite Luzy, 87 ans et beaucoup de plaisir à parler de ses activités passées.

[dropcap1]C[/dropcap1]e jour là, Félix nous livre ses trucs pour la fabrication de paniers à l’ancienne.

Attention, il y a deux sortes de paniers : Les paniers type « parson » sont plus longs à fabriquer, mais plus solides. Les paniers type « comédien », sont fabriqués plus vite, mais généralement moins solides. La fabrication est complètement différente, pour le « parson », on commence par l’anse et c’est le contraire pour le « comédien » . Les anciens occupaient leurs soirées d’hiver à tresser des paniers et autres fabrications utiles au champs et au jardin. La fabrication des paniers était plutôt un travail d’hommes, car il fallait un peu de force pour plier les bois et tresser l’osier.

Il est très important de choisir la bonne matière :

Pour les armatures et les anses, j’utilise du châtaignier, on peut également prendre du noisetier.

Il faut couper des jeunes pousses bien droites à la base des châtaigniers. Il est très important de couper le bois en vieille lune (dernier quartier), avant la montée en sève (généralement en novembre) et de préférence les pousses qui sont côté nord.

Pour l’habillage, j’utilise l’osier, c’est un arbuste qui se reproduit facilement par bouturage

Il suffit à l’automne ou au printemps d’enterrer aux deux tiers une branche coupée dans la terre. Le saule préfère une terre profonde et relativement humide. Il ne faut pas avoir peur de tailler toutes les pousses en fin d’année, l’arbre ne meurt pas, et d’autres pousses seront disponibles l’année suivante. Il existe plusieurs osiers avec des couleurs différentes, l’osier jaune le plus courant, mais aussi du vert, l’osier des vanniers , on peut ainsi varier les couleurs des paniers. J’utilise également des pousses de « filandes ». L’osier peut également se trouver à l’état sauvage au bord des rivières, mais lorsqu’il est taillé, les tiges sont plus longues et plus droites. Le bois se travaille beaucoup mieux dans les deux ou trois mois qui suivent la coupe, après, il sèche et c’est plus difficile.

L’anse et le tour en premier:

On plie à l’aide du genou une branche bien droite de châtaignier pour lui donner la forme de l’anse, il faut effiler les extrémités pour pouvoir les raccorder ensembles sur le dessous du panier. Puis avec une tige fendue en deux, ou fabrique le tour en deux morceaux, la tige est fendue avec le couteau. Ces trois morceaux sont attachés entre eux au moyen de clous ou de fil de fer..

La préparation des tiges d’osier :

Les tiges sont fendues avec un fendoir en bois fabriqué dans du bois dur, chêne ou noisetier par exemple. J’ai des fendoirs pour fendre en trois ou en quatre suivant les tiges que je veux. Ensuite, il faut gratter les tiges au couteau pour les assouplir et les calibrer, c’est la tige qui passe sur le couteau et pas l’inverse. Je mets un tissu épais sur ma cuisse pour protéger mon pantalon. Si on veut des tiges d’osier blanches, il faut faire bouillir les tiges pendant 2 heures (j’utilise pour cela une ancienne chaudière à cochons) et retirer l’écorce.

L’œil de pigeon:

La confection de l’œil de pigeon est important, car c’est le point de départ de la confection du panier. Il faut toujours commencer avec l’extrémité la plus fine de la tige qu’on coince dans l’intersection de l’anse. Je tresse l’œil un peu comme un brelage (voir photos).

Mise en place des autres structures: Il faut effiler des tiges de châtaignier, les épointer et les former pour avoir des intervalles pas trop larges, sinon le panier ne se tiendra pas bien. Ensuite, il suffit de tresser les tiges d’osier entre ces arçons. Les arçons ne sont pas tous mis en même temps, on met déjà ceux qui vont dessous, puis on complète progressivement. En tressant, il faut régulièrement revenir en arrière avec la tige d’osier pour compenser l’arrondi du panier. On s’arrange également pour ne pas faire de retours plusieurs fois sur le même arçon.

Les paniers comédiens :

Je structure d’abord le tour du panier.Il faut toujours un nombre impair de longes pour que le tressage se fasse bien. Le fond se fait après, on enfile des bois dans le panier, puis on tresse à nouveau. Il faut fendre les traverses en deux sur une certaine longueur pour passer les longes à l’intérieur. Puis on enfile l’anse dans les bords, il faut tresser autour de l’anse et passer dans le panier pour l’attacher, c’est plus rapide, mais c’est moins solide qu’un « parson ».
Les Paillassons : On utilise la paille de seigle pour faire des paillassons qui servaient à faire lever la pâte à pain. On confectionne un boudin de paille d’environ 2 cm de diamètre, pour le démarrage, il faut plier la paille en deux et partir du centre pour faire un genre d’escargot. Petite anecdote, cette partie centrale était un peu plus fragile et quelquefois les souris en profitaient pour rentrer dans le paillasson. Pour serrer la paille et la maintenir, on utilise la ronce. Il faut enlever les épines au couteau puis la fendre en deux. La ronce est spiralée autour du boudin de paille, et il faut la passer dans les boudins adjacents pour les assembler. De la même manière, les anciens fabriquaient leurs ruches.

Le ratafia : Après cette « épuisante » interview, Felix offre un excellent ratafia, je n’ai pas résisté à lui demander la recette. Mettre dans un pot de grés trois litres de jus de raisin, un litre de marc ou d’alcool de fruit et 500 gramme de sucre. Tourner 2 à 3 fois par jour pendant 5 à 6 jours, filtrer et mettre en bouteilles. C’est trop simple et c’est trop bon, essayez donc.

Voir également article sur Jean-Pierre Hédeline dans le n° 36 de Vents du Morvan